Vendredi 1er décembre 2006 à 17:12

"Chanson juste pour toi

Chanson un peu triste, je crois...

Trois temps de mots froissés,

Quelques notes et tous mes regrets

[...]

Tous mes regrets de nous deux

Sont au creux de ma voix

Comme do-ré-mi-fa

Sol-la-si-do-C'est une chanson en souvenir,

Pour ne pas s'oublier sans rien dire

S'oublier sans rien dire..."

Carla BRUNI, Chanson triste

(Nettement moins peachy que ne le laissait malhonnêtement entendre le titre, je sais... J'adore vous décevoir...)

Il y a des moments où je voudrais chanter, sans complexes, jusqu'à me péter les cordes vocales, jusqu'à en perdre la voix et la conscience, chanter le plus fort et le plus sauvagement possible, pour tout oublier.

J'aimerais faire craquer, détruire ces barrières qui m'empêchent d'exprimer ce que je ressens, qui brisent ma voix et font couler mes larmes quand j'essaie... (vous avez essayé de chanter en pleurant et hoquetant comme un veau? Autant essayer de siffler la Traviata pendant un 400m-haies olympique...)

Je me suis rendue compte qu'il y a une grande différence entre être rêveur et avoir des rêves... Je suis rêveuse quand j'ai la tête dans les nuages, les yeux dans le vague, quand je m'échappe de la réalité pour quelques instants (sans substances que la société réprouve, parfaitement!), une bouffée de fraîcheur dans un présent sentant furieusement le renfermé...

Cela dit, j'ai beaucoup de rêves dans la tête, qui me rattachent à la réalité parce que je sais qu'ils ne se réaliseront probablement jamais, et sont plus faits de regrets inutiles qu'autre chose...

Mon plus beau rêve (à part le décès prématuré de tous les membres masculins de plus de 50 ans de ma famille proche, une histoire d'amour belle et/ou normale, être heureuse et savoir chanter, entre autres), c'est de posséder une église. Oui, oui, une église! C'est pas que je donne dans la bigoterie et autres bondieuseries diverses, hein! Il y a des gens qui achètent des lieux de culte désacralisés pour en faire des habitations, des musées, voire des boîtes de nuit... (c'est classe, mais vive les notes de chauffage et d'entretien! Je plains ceux qui doivent se taper les carreaux...)

Mais une église à moi, avec cette merveilleuse acoustique caractéristique de ces vénérables antiquités gothiques (que de tiques), pour y chanter à l'abri des oreilles indiscrètes, c'est un rêve si merveilleux que j'en ai les larmes aux yeux! (bon, ça suffit les rimes à 2 balles)

La voix s'élève dans le silence, l'écho en masque charitablement les imperfections, et on a presque l'impression de pouvoir chanter en harmonie avec soi-même...

Imaginez le Miserere d'Allegri (prochainement sur ces pages quand j'aurai le quoi, le qu'est-ce, le comment et le temps), ces notes pures remplissant sans effort tout l'espace, jusqu'à ce que la voix nous entoure comme un cocon protecteur...

J'imagine bien les gros titres dans les journaux: "Mort mystérieuse: La propriétaire de l'église désaffectée retrouvée décomposée en milliers de notes; la thèse du suicide lyrique n'est pas écartée"

Ca c'est une mort qui aurait de la classe!

...

Ca se voit que je subis un cours super passionnant? Tendons l'oreille:

"Quels sont les obstacles juridiques à la désignation bénéficiaire des associations?"

Argh. Rien de tel pour remonter un moral dans les chaussettes qu'un cours d'assurance-vie. Tout de suite, les petits soucis de la vie, les problèmes du monde, ruptures amoureuses, maladies, guerres, se trouvent curieusement relativisés et presque mesquins par rapport à l'exubérante cruauté de ce genre d'épreuve qui soumet le cerveau humain à un ennui si destructeur qu'entre deux vérités professorales assénées avec le sadisme tranquille et gratuit de Celui-Qui-Sait (et qui est déjà passé par là), on entend presque les cris de douleur des neurones génocidés par milliers dans l'indifférence générale. Respirez.

... Encore 20 minutes avant la pause...

Tiens, mon téléphone vibre, me rappelant ainsi que la vie suit son cours à l'extérieur de ces murs blancs, propres et même ornés, pour ne pas tomber dans le cliché de roman larmoyant (où les décors sont couramment sombres, suintants et décrépis. Je me demande d'ailleurs si les histoires d'horreur ne seraient pas plus effrayantes dans un décor coquet et pimpant plutôt que dans une vieille baraque vermoulue au fond des bois? A voir, transformer "Freddy contre Jason" en "Freddy et les trois ours" ou "Freddy chez les sept nains"...).

Je me prépare mentalement à la déception, sachant que la seule personne dont je souhaiterais de tout mon coeur un appel ne se manifestera pas, et je vérifie. L'espoir n'est pas déçu, la déception est bien au rendez-vous.

... Encore 19 minutes avant la pause...

Certains autour de moi ont succombé, le regard vide ou les yeux clos, la bouche ouverte, l'écume au lèvres, dans le silence rempli de sang et de larmes métaphoriques. Le professeur achève sans pitié les blessés et les agonisants de son sourire vainqueur et de ses questions sournoises, tandis que nos rangs s'éclaircissent, les têtes tombent et roulent sur les tables...

Je m'accroche d'une main résolue à mon stylo, la feuille remplie de mes élucubrations me tient lieu de bouclier, une seule pensée farouche me guide et me maintient debout: la vie, les profs, les gens, les rêves, les déceptions... Vous ne m'aurez pas. Pas encore. Pas sans combattre...

Par http://www.auxcopains.fr le Samedi 9 juillet 2016 à 9:43
En effet, il fait un temps dégueulasse aujourd'hui, dehors comme dedans.
 

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